Mon billet d'humeur envers les humains.../...(Michel Hallet)
C'est
mon billet d'humeur envers les humains ou ce qu'ils croient en être
sous forme de conte. Ratou et Cloé : -Allez Ratou, magne-toi, il
faut que nous trouvions à manger ! -Oui maman, mais avance moins
vite, je n’arrive pas à te suivre ! -Ce quartier est sinistre et
triste la nuit, pas d’éclairage dans cet endroit oublié des
humains à cette heure, j’espère que les chats sont au lit. -Dis
maman pourquoi va-t-on chercher de la nourriture chez les autres,
n’est-ce pas du vol ? -Toujours à dire Ratou, tu apprendras de la
vie que rien n’appartient à personne. S’il y a de la nourriture,
c’est pour qu’elle soit mangée et cela tombe bien, nous avons
très faim et nous ne trouvons plus dans les champs de quoi nous
substituer. -Je ne comprendrai jamais pourquoi nous sommes obligés
de nous cacher la nuit pour voler à manger ! -Tais-toi et avance !
-Dis maman, c’est quoi ce bruit ? -Ne te pose pas de question,
avance ! Nous sommes bientôt arrivés à notre garde-manger. -Mais
maman arrête-toi deux minutes, on dirait quelqu’un qui gémit !
-C’est un chat peut-être, avance je te dis ! -Mais non ce n’est
pas un chat, on dirait un humain ! -Les humains dorment à cette
heure ! Ne t’occupe pas des autres, viens ! Si tu continues, il va
nous arriver des ennuis, pour ta deuxième sortie, tu es chiant
Ratou. Ratou, n’entendait sa mère, il s’arrêtait pour mieux
entendre au risque de se faire rabrouer encore. Elle en fit de même
pour ne pas l’égarer. Il quitta le trottoir pour rentrer dans un
jardin, pas très bien entretenu d’ailleurs et se dirigeait vers un
soupirail sans fenêtre. Sa mère avait la rage, mais elle
connaissait bien le caractère de son rejeton, elle le suivait quand
même. -Ecoute maman, écoute ! N’est-ce pas une petite fille que
je vois là-dedans, dans cette cave ! -Montre-moi, c’est une gamine
d’humain, ne t’occupes pas de cela, j’ai la dalle moi, aller on
y va ! -Elle pleure maman, tu entends ! Elle doit avoir un problème
? -Ratou, les caves, la nuit c’est pour les rats pas pour les
enfants d’humain. Je ne sais pas ce qu’elle fait là ? Mais c’est
inhabituel ! -Eh, toi là-bas ! Qu’est-ce que tu fais ici ? La tête
d’une gamine quittait ses deux mains pour chercher d’où venait
cette petite voix qu’elle ne comprenait pas. Les yeux étaient
rougis de larmes évaporées, la gamine n’était bien vieille,
trois à quatre ans pas plus. -C’est qui qui parle ? J’ai peur
dans le noir, je ne vois presque rien ! -Regarde par le soupirail, je
suis un petit rat ! -Un rat, mais c’est dégoûtant ! -Je suis un
rat des champs, c’est mignon un rat des champs ! -Que me veux-tu
alors ? -Rien, rien, je t’entendais gémir, je voulais voir qui
s’était ! Tu habites ici ? -Quand ils ne sont pas là, ils
m’enferment ici, pour que je ne fasse pas de bêtise à ce qu’ils
disent ! -Tu es donc seule dans cette maison ! -Ratou, viens ! Nous
allons avoir des problèmes. -Non, maman ! Nous n’allons pas
laisser cette petite fille comme cela, il fait froid cet hiver, pour
nous ce n’est pas grave, mais pour eux les humains, c’est autre
chose. Regarde la gamine, comme elle est ? -C’est vrai que pour la
saison, elle n’a pas grand-chose sur les fesses, mais cela ne te
regarde pas, c’est le problème des humains. Si elle est seule ici
c’est qu’il y a une raison qui ne nous regarde pas ! -Toujours, à
faire la morale, toujours faire attention, je comprends maman, mais
pour une fois un peu de compassion ! -Mais que veux-tu que l’on
fasse ? -Je ne sais pas, mais je vais y réfléchir ! Dis la petiote
comment t’appelles-tu ? N’ai pas peur, nous ne te voulons pas de
mal et tu n’aurais pas peur d’une petite bestiole comme moi quand
même ! -C’est Cloé ! -Viens, approche-toi ! Que nous te voyons un
peu mieux. -Mais moi je ne vous vois pas ! Je vois seulement vos yeux
dans le noir ! -Approche-toi du soupirail, nous allons reculer, la
pénombre de la rue nous montrera un peu plus. -Ah oui, c’est mieux
ainsi ! -Mais ma petiote, tu es transis de froid, tu n’as pas de
couverture ? -Non ! -Et pourquoi es-tu enfermée ici ? -C’est mon
beau-père, il ne m’aime pas ! -Et pourquoi cela ? -Je ne sais pas
moi, peut-être parce que je vivais seule avec maman, avant ! -Tu
n’as plus de papa ? -Il est parti un jour en m’oubliant là ! -Tu
dois être bien méchante pour qu’il t’enferme ainsi ! -Je ne
sais pas, je ne pense pas, je n’ai pas le droit de parler, je n’ai
le droit de rien dire ! Depuis que son bébé est né, c’est encore
pire ! -Pourquoi donc ! -Je ne sais pas moi, je ne sais pas. Mais
depuis, il ne m’emmène plus, il m’enferme ici ! -Dis Ratou,
j’entends des pas s’approcher de la maison, il faut qu’on
s’enfuie d’ici. -Bien maman ! Dis Cloé, tu veux bien devenir mon
amie ! -Mais Ratou cela ne se fait pas ! Un rat l’ami d’un
humain, tu dis n’importe quoi ! -Tu reviendras me voir petit rat ?
-Dis maman, nous reviendrons ? -Elle n’est pas toujours punie ici
j’espère ? -Non, il faut que je trouve une solution pour savoir
quand Cloé est là. Oui je reviendrai avec maman. -A bientôt petit
rat ! -Tu peux m’appeler Ratou comme maman, à bientôt Cloé !
Ratou et sa maman continuait leur chemin pour trouver pitance, un peu
d’humanité ne nourrit pas son monde, Ratou était perturbé, il
n’était très affamé, laissant à sa mère le boulot de chercher
jusqu’à ce qu’ils trouvent une petite réserve de blé, caché
par des humains pas trop malin. -Dis maman, je peux te parler
maintenant ? -Oui, mon petit Ratou. Dis tu m’as l’air bien
préoccupé ? -C’est mon amie Cloé, maman. Qu’est-ce que je peux
faire pour elle ? -Tu t’en fais bien de trop pour un humain, tu
sais, tu comprendras plus tard quand tu auras échappé nombre de
fois à leur perversité, des pièges pour nous déchirer, du poison
pour nous empoisonner, ils ont de l’imagination ces pervers. Et
pour la petite que peut-on faire ? Je n’en sais rien ! -Dis maman !
Je pourrais en parler à mes cousines les souris, pour qu’elle
veille sur elle dans la maison et qu’elle nous dise quand elle sera
de nouveau, enfermée dans la cave. -Ce n’est pas bête mon petit
Ratou, ce n’est pas bête ! -Pour mieux comprendre les humains, on
devrait en parler à ta cousine la rate blanche Ratetata ! -C’est
celle qui vit chez un vieux bonhomme, Serge. Je crois qu’elle est
un animal de compagnie là-bas ! -Oui, c’est cala maman ! -Tu me
surprends mon Ratou ! Quand on dit que les rats sont intelligents tu
en es la preuve ! Sur le chemin du retour Ratou, ne disait plus mot,
il restait derrière sa mère, pas besoin ainsi de réfléchir au
danger, maman s’en accommodait. Il était bien occupé le petit
rat, à réfléchir à comment aider sa nouvelle petite amie. Ce fut
ainsi jusqu’à ce qu’ils rejoignent le reste de la fratrie bien
sage sous la responsabilité du Rat papa. Il rapporta à son père sa
découverte. -Mon petit, il ne faut pas se mélanger à ces êtres,
ils sont bizarres et ont des mœurs pas très compréhensifs. Ils ont
tué nombre de nos familles depuis toujours, mais nous sommes
toujours là, discrets et peut-être plus nombreux qu’eux. On ne
peut pas avoir confiance, quelques malins de nos frères blancs se
sont faits accepter, mais ils vivent en cage, prisonnier, au cas où.
-Je sais papa, je sais, mais cette petite fille ! -Tu suivras ta
maman et s’il le faut avec moi, mais tu garderas tes distances avec
ces gens-là, n’est-ce pas ? -Oui papa, oui. -Dis maman où puis-je
rencontrer ma cousine Souricette ? -Bien demain soir, tout près d’où
nous étions, dans la vieille grange en ruine. Elle s’est foutue à
la colle avec un mulot, un sacré couple ces deux-là. Mais enfin,
elle est adorable ! Tu n’iras pas tout seul, je t’accompagnerai,
nous ferons pitance après ! -D’accord maman ! -Dis Ratpapa, il ne
va pas nous lâcher avec cette gamine. --Tu as raison Ratine, il
faudra surveiller cela de près. Ratou se moquait un peu des pensées
de ses parents, il partit se repaître dans un coin sombre sous les
lattes d’un plancher un peu pourri et fit les plus beaux rêves.
Des rêves d’amitié, de jeu, de copinage avec la petite fille
rencontrée le soir. Et dans les rêves on ne pose pas de question
matérialiste, ni moins encore des règles de vie. On vit en rêve ce
qu’on a envie de vivre, bien entendu avec des situations
impossibles, inextricables, invraisemblables. Mais qu’importe, les
rêves enrichissent la vie. Il piaffait d’impatience, dans
l’attente du sombre d’un soir pas trop pressé, il avait hâte de
revoir sa petite amie Cloé. -Dis maman, il est temps je crois ?
-Ratou, il ne fait pas assez noir encore, les humains traînent
dehors, tu peux attendre quand même. -Oui maman ! Puis, enfin le
noir fut noir, le silence fut d’or, il était maintenant temps de
partir. Le petit rat impatient, était le premier à l’air libre,
maman devait retenir l’enthousiasme de son rejeton. Le raton ne
communiquait plus, trop pressé de passer devant le soupirail.
-Regarde maman, comme c’est beau ces lumières ! -Saloperie
d’humains, ils ont remis leur décoration de Noël en marche, il
faudra encore prendre plus de précaution, viens avec maman mon
Ratou. -Dommage je trouve ça beau, moi! Dis maman ! On est arrivé ?
-Soit patient Ratou ! Sois patient, il y a encore bien cinq minutes
encore ! -Dis maman pourquoi les humains ils s’habillent et pas
nous ? -Quelle question mon chéri ! Où vas-tu chercher tout cela ?
Tu es tordu quelques fois…Parce qu’ils ont froid ! -Ah bon !
-Tiens on arrive chez la petite fille ! -J’y vais maman, j’y vais
!...Dis maman, elle n’est pas là ; il n’y a rien là-dedans.
-Elle n’est peut-être pas punie tous les jours ! -On fait quoi
alors ? -Tu ne voulais pas rencontrer Souricette ? -Si si ! C’est
loin ? -Je te l’ai dit hier, c’est à côté, dans la grange là,
tu vois ? -Oui, oui ! -Laisse-moi faire, il ne faut pas que la
famille souris pense que c’est une attaque de mauvais rats !
-Souriante Souriante, c’est Ratine ! -Ne crie pas si fort les
mauvais rats pourraient t’entendre ! Que me vaut cette visite ? -Un
petit service que Ratou veut demander à ta fille Souricette. -Et
bien nous allons les laisser bavarder ensemble et nous on va bavasser
en grignotant des grains de blé. -C’est sympathique ! -Souricette
! Souricette ! On t’attend ici ! -Oui, maman, c’est qui ? -Ratou
! -J’arrive ! J’arrive ! Elle ne tarda pas à accueillir le petit
rat. -Je suis contente que tu viennes me voir, c’est sympa ! -Dis
Souricette ! J’ai un service à te demander, un grand service ?
-Vas y ! Demande ! -Tu connais la maison grise de l’autre côté de
la rue ? -Oui je vois ! -Et bien dans cette maison il y a une petite
fille qui semble bien malheureuse. Et je voudrais faire quelque chose
pour elle. -C’est bizarre comme démarche ! Aider un humain. Mais
pourquoi pas, nos parents racontent tellement de conneries sur eux,
qu’il y en a peut-être des bons, dans le lot. Alors que veux-tu
que je fasse ? -Que tu m’avertisses quand elle sera punie et
enfermée dans la cave ! -Tu te rends compte, pour nous, ce ne serait
même pas une punition d’être enfermé dans une cave, bien au
contraire. Oui, je passerai voir chaque soir, et je passerai le
message à mes cousines pour que tu sois informé au plus vite. -Ah
ça c’est sympa ! Je savais que je pouvais compter sur toi. -Dis
pourquoi fais-tu cela ? -Je ne sais pas, elle faisait si triste la
gamine ! -Il faut se méfier des humains, ce sont des êtres pas
sains ! -C’est ce que maman et papa me dise, mais enfin. -Dis
Ratou, alors c’est réglé avec Souricette ? -Oui maman, nous
pouvons y aller ! Merci Souricette, si un jour tu as besoin, n’hésite
pas à me demander ! -Bon merci Souriante et Souricette, à bientôt
! -Alors mon fils, ça marche ta combine ? -Oui maman ! Le petit rat
jetait encore un regard sur la maison grise, pas une âme qui vive
par le soupirail, pas un bruit. Il continuait sa route avec sa mère
le train moins alerte, l’allure bien moins fière. Il s’installait
parmi sa famille sans un mot, triste de n’avoir vu son amie. Puis
deux ou trois jours défilèrent ainsi et une cousine de Souricette
vint lui annoncer que de nouveau Cloé était enfermée dans cette
cave. -Maman, maman ! Il faut y aller ! Cloé est encore enfermée
dans la cave ! -Dis garnement ! Maman n’est pas à tes volontés,
tu n’es pas tout seul dans la famille ! -Maman ! Va avec Ratou,
nous sommes plus grands, nous irons avec papa, va avec ton petit
dernier, le petit chouchou à sa maman. -Ah Rabougris ! Arrête de ma
taquiner ! Bon Ratou, nous y allons ! Es-tu prêt au moins ? -Mais
bien entendu maman, j’emmène un bout de pain. -As-tu réfléchi
garnement ? Ce bout de pain c’est à peine une bouchée pour cette
gamine ! -Et bien c’est mieux que rien ! Et les voilà de nouveau,
sur la route de la maison grise, Ratou courait presque tirant sa mère
par la patte. Presque jusqu’à chuter sur ces maudits pavés. Un
sourire déchirait sa gueule quand il aperçut de nouveau Cloé.
-Bonjour Cloé, comment tu vas ? Elle s’approchait au plus près du
soupirail pour mieux voir son visiteur, la maman rat se tenait à
discrétion. -J’ai froid, j’ai beaucoup froid et j’ai mal un
peu partout. -Ma pauvre Cloé, tiens je t’ai emmené un petit bout
de pain. -C’est gentil Ratou, c’est gentil ! Je n’ai pas mangé
aujourd’hui. -Mais pourquoi as-tu mal ainsi ? -Je suis tombée dans
les marches, il m’a poussée dans l’escalier, l’autre. -Tu n’as
rien de cassé ? -Je ne crois pas, non je ne crois pas ! -Eh dis à
qui tu parles en bas ? -Je me parle toute seule ! -Ratou, va-t-en, il
va descendre et s’il te voit ! -Il ne me verra pas d’ici !
-Va-t-en, je ne veux pas qu’il t’arrive quelque chose ! -A
bientôt Cloé ! La porte du sous-sol s’ouvrait avec violence,
Ratou se retirait de la pénombre pour ne pas être vu, mais il
voyait bien l’homme prendre la petite comme un sac de linge sale,
la giflant à la volée. -Ratou, viens-là, viens-là ! C’est trop
dangereux mon petit, viens ! A contrecœur, Ratou quittait les lieux,
regardant sans cesse par-dessus son épaule, pour tenter de
distinguer un signe de vie de sa petite amie. -Maman, il l’a frappé
avec sa grande main sur son petit visage, il est méchant cet homme.
-Ils sont souvent ainsi les humains, violents entre eux pas très
respectables. -Je comprends mieux maman, je comprends mieux, mais on
ne peut pas laisser Cloé ainsi. -C’est le domaine des humains !
Ratou on n’y peut rien, tu ne peux rien faire pour elle ! -Ah si !
Je ne vais pas laisser Cloé ainsi ! Comment s’appelle ta vieille
cousine la rate blanche ? -Ratetata ! Elle vit chez les humains et
souvent prisonnière dans une cage ! -Mais tu disais une fois que
l’homme qui l’hébergeait était gentil, qu’il la prenait dans
ses mains pour la caresser. -Ne t’y fis pas pour autant! Cet homme
semble mieux et il est vrai qu’il s’occupe bien de cette cousine,
mais cela reste un humain. -Bon comment peut-on contacter ta cousine
? -Je t’emmène demain, mais là c’est différent, il faudra
rentrer dans la maison par la cheminée, il faudra que la cendre soit
froide, ce sera plutôt en milieu de la nuit. C’est compliqué et
c’est risqué mon petit. -Ce n’est pas un problème, puisqu’il
le faut, il faut le faire ! -Mais qu’est-ce que tu vas lui demander
? -Je ne sais pas trop encore, je vais y réfléchir dans la journée.
Toute la journée, planqué dans l’incompréhension de ses proches
endormis, il ruminait sa rencontre. Demain, sans doute, il serait en
petite forme. Et dans une impatience insupportable, le petit rat,
après avoir énervé toute sa petite famille, était prêt à partir
avec sa maman, pour une nouvelle aventure. Rencontrer une rate amie
des humains, après avoir descendu une cheminée d’au moins sept
mètres de hauteur, c’était une aventure pour un petit rat. Et
puis, il y avait maman et avec maman on pouvait avoir confiance. -Dis
maman, c’est dangereux une cheminée ? -Quand les cendres sont
froides, pas de trop non. Le pire risque est de mourir brûler dans
les flammes. Et rappelle-toi garnement, tu n’as même pas le temps
de souffrir. Le risque de tomber sur la cendre est moindre et la
cendre amortit le choc. Tu as peur ? -Pas avec toi maman ! Seulement
un peu d’appréhension. -Tu vois ! Nous sommes arrivés, il faut
monter sur le toit. Suis-moi de près Ratou ! Restons dans la plus
grande pénombre. -Oh maman, c’est marrant ! -Fais attention ! Ils
arrivèrent bien vite au fait du toit sur le bord de la cheminée,
prêts à descendre. Mais avant, de nouveau, les dernières
recommandations de maman. -Ratou, ce coup-ci tu fais très attention.
Mais avant respire un peu au bord ? -Sens-tu quelque chose ? -Une
odeur bizarre ! -C’est l’odeur de la cendre, il n’y a plus de
fumée et l’odeur nous dit que la cheminée est éteinte depuis un
bout de temps, plus de risque mon petit Ratou. Aller on descend !
C’est vertical, tu as des griffes, sers-toi en bien ! La descente
fut longue et attentionnée, tous les deux étaient dans les cendres.
-Dis maman où elle est ? -Je la sens par là, elle doit être dans
sa cage ! -Pourquoi est-elle enfermée ? -Tu sais les humains sont
bizarres, je ne le sais pas, peut-être pour qu’elle reste bien ici
! -Ah Ratetata ! Je ne te dérange pas ! -Je t’attendais, une
cousine souris est passée tout à l’heure pour m’informer. C’est
toi Ratou ? -Oui, oui, bonjour ! -Ratou a quelque chose à te
demander, si tu peux, bien entendu l’aider. -Alors, Ratou !
Qu’as-tu à me demander ? -Bien c’est délicat ! C’est pour une
petite fille qui est malheureuse. -Comment cela malheureuse ? -C’est
son beau-père qui l’enferme dans la cave quand ils vont se
promener avec maman. Puis, on l’a vu, il la frappe. -Tu sais bien
que les humains sont ainsi, ils ne sont pas comme nous, ta maman a dû
t’expliquer ! Elle habite où cette demoiselle ? -Pas très loin,
dans le quartier ! -J’ai une petite idée. Mon humain à moi est un
bon gars, je pense que je pourrais l’emmener la voir. -Mais comment
cela ! -Oh tu sais, c’est facile ! Cet imbécile pense m’enfermer
dans la cage. Mais je peux ouvrir la porte comme je veux et simuler
une escapade, il me cherchera alors et avec un petit jeu de piste, il
sera près d’elle ! -C’est génial ça, mais que pourra-t-il
faire ? -Je n’en sais rien, il faudra faire confiance à son émoi,
les humains sont aussi surprenants dans cet exercice. Il est très
sensible. Mais comment je saurai que la petite est enfermée dans la
cave. -Souricette ! Souricette nous informera, elle informe ses
cousines qui passent le message partout. -Je le saurai alors, il y a
aussi plein de souris qui se cachent dans les murs, Serge ne veut pas
y toucher. -Ah merci, merci. Dis maman comment on dit plus que merci
? -Merci Ratou cela suffit ! Laisse les superlatifs aux deux pattes !
-Eh bien maman on y va ! Je suis content. -Merci Ratetata, Ratou est
réjoui, on verra le résultat. Il était heureux comme pas possible,
il sifflait même en remontant la cheminée et sur le chemin du
retour. -Dis Ratou, tu es bien gai, maman n’existe plus ! -Oh maman
tu ne sais pas comme je suis content. Je pense que le calvaire de la
petite fille sera terminé et qu’elle sera libérée de ce vilain
bonhomme. -Comme tu y vas mon petit ! Je ne voudrais pas refroidir
ton enthousiasme, mais cela s’avérera sans doute bien plus
compliqué. -Ah maman rabat-joie, on verra bien ! Le discours fut
court, le retour au bercail aussi. Il fallait retourner à la chasse
à la nourriture, pour mieux se poser le jour. Ratou, lui faisait
l’impasse, maman lui ramènerait bien quelque chose à grignoter.
Lui, il était déjà dans son histoire, celle qu’il imaginait,
finissant bien pour sa copine Cloé. Après deux jours sans nouvelle,
une alerte de Souricette fait réapparaître la petite Cloé dans son
cachot improvisé. -Maman, maman ! C’est Cloé ! -On y va mon
garnement ! En partant pour la cave, ils croisèrent Ratetata, qui
leur fit signe de ne pas faire de bruit et de l’ignorer. Elle était
suivie d’une portée de regard, d’un grand bonhomme qui traînait
un faisceau de lumière pour retrouver sa petite rate blanche. Elle
se montrait puis se planquait. Ratou et sa mère les suivaient du
regard, sans les déranger. C’était à rire de voir ce grand
gringalet, un peu désarticulé, cherchait avec sa pétoche, dans la
neige qui commençait à tomber, sa petite bestiole qui le faisait
tourner en bourrique. Ils n’étaient pas qu’eux deux à suivre le
manège, d’autres petits yeux regardaient le spectacle. Puis, le
grand dadais s’arrêta tendant l’ouïe et se rapprocha d’où
venaient des pleurs. -Qui est là ? Il y a quelqu’un là-dedans ?
-C’est Cloé ! -Mais que fais-tu là ? -Je suis punie, ils sont
partis se promener ! -Tu es seule ? -Je crois oui, de côté-ci, mais
de votre côté je vois mon ami Ratou et ses amis. -Il fait froid et
tu n’as qu’un tee-shirt sur le dos. Je vais voir qui habite ici !
-Regarde maman ! Il est parti sonner à la porte ! Il insiste
fortement, il va défoncer la porte. Ah Ratetata ! Merci tu as bien
réussi ton coup ! -Pas trop difficile, il me mange dans les doigts.
C’est une expression, ce serait plutôt l’inverse, il me nourrit
dans ses mains. -Tiens Souricette ! Vous êtes tous là ! -Regarde !
Il appelle quelqu’un au téléphone ! -Je pense que c’est les
flics, viens maman on va s’approcher plus près ! -Attention Ratou
qu’on ne se fasse pas remarquer ! -Oui maman, c’est quoi ce bruit
si fort ? -Ce sont les sirènes des policiers et d’une ambulance !
-Ils vont la libérer maman, dis ! -Regarde Ratou ! Regarde, ils ont
allumés la lumière de la cave. Tu la vois mieux maintenant Cloé,
pleine lumière. Pauvre petite, dans quelle état elle est. Ils vont
l’emmener ! Cloé disparut dans les bras d’un ambulancier tandis
que Serge faisait une déclaration aux policiers. Puis, tout retomba
comme c’était à l’habitude, plus de lumière, plus de
gyrophare, plus de sirène. Le presque noir de la nuit sous un ciel
gris seulement tacheté de quelques flocons qui volaient sans aucun
bruit. Un silence pesait sur le regard de Ratou, la mine contrastée,
elle était sauvée grâce à Ratou, et il ne la reverrait peut-être
plus. -Dis maman ! Tu crois que je reverrais Cloé ? -Ça mon petit
Ratou, ce n’est pas gagné, loin d’être gagné ! La tête
renfrognée, le regard un peu triste, frustré de ne pouvoir profiter
de cet instant de liberté de la petite Cloé. -Ratou ! Ratou !
Arrête ! Attends-moi, j’ai quelque chose à te dire. Il se
retournait prestement comme happé par ces paroles venant d’un
autre monde. -Oui, oui ! C’est quoi ? -Et bien dis donc Ratetata !
Tu es essoufflée ? -Je cours depuis là-bas, pour vous rattraper.
Dis Ratou ! Cloé demande à te voir. Le visage de Ratou explosait de
joie, les yeux étaient pleins de lumière, un peu humide sans doute
! Il ne tenait plus en place, il débordait de joie. -Maman ! Maman !
Je peux y aller, je peux y aller ? -Je t’accompagne, mais pas
longtemps Ratou. Il était entouré de Ratetata, de Souricette et
d’autres amis qui avaient participé à l’aventure. Puis, il
s’approchait d’une ambulance où la petite fille était allongée.
-Monte, monte ! -Mais ils vont m’écraser, me tuer, les humains !
Ratetata la rate blanche le prit par la patte. -Tu ne risque rien.
Serge a déclaré que tu étais un rat domestique comme moi, son rat
domestique. Il faut que tu te tiennes bien! Je blague bien entendu.
Viens, viens ! -Maman, maman ! Qu’est-ce que je fais ? -Va, va !
Ratetata te ramènera ! C’est ainsi que Cloé quitta l’endroit de
ses malheurs, seulement accompagnée de deux animaux de compagnie,
vers un endroit où des humains la protègeront. -Maman, maman, je
suis revenu maman ! Demain c’est le Noël des humains, maman. Cloé
va organiser une soirée chez Serge avec tous les quatre pattes qui
l’ont aidée, toi aussi maman. -Tu iras Ratou. Moi non, je resterai
avec notre famille. Toi c’est normal, c’est toi qui a voulu aider
cette gamine, c’est bien mon Ratou ! C’est bien ! Je suis fière
de toi.
Michel Hallet